La Déclaration d’Intention d’Aliéner (DIA), dans le cadre du droit de préemption urbain (DPU), impose à la commune un délai de deux mois pour se prononcer. Passé ce délai, l’absence de réponse vaut renonciation. Pourtant, dans la pratique, de nombreuses communes ne répondent pas aux DIA dans les délais. Cette inaction peut créer une forme d’incertitude pour les notaires, vendeurs et acquéreurs. Pourquoi ce silence ? Est-il légal ? Et comment y faire face ?
Une absence de réponse encadrée par la loi
Selon l’article L213-2 du Code de l’urbanisme, le silence gardé par le titulaire du droit de préemption pendant un délai de deux mois à compter de la réception d’une DIA complète vaut renonciation à ce droit. Ce principe est donc clair : le défaut de réponse équivaut à un feu vert implicite, et permet la poursuite de la vente.
Cependant, pour des raisons de sécurité juridique, de nombreux notaires préfèrent attendre un accusé de réception officiel, ou une réponse explicite de la commune, avant de signer l’acte authentique. C’est ce qui génère parfois des blocages, surtout lorsque la DIA a été transmise sans retour clair.
Pourquoi certaines communes ne répondent-elles pas ?
1. Des services urbanisme sous-dimensionnés
Certaines mairies, notamment en milieu rural ou dans les petites communes, ne disposent pas de service urbanisme dédié. Les élus ou agents polyvalents ne traitent les DIA qu’en fonction de leur disponibilité. Le traitement peut donc prendre du temps, ou être laissé de côté si aucune préemption n’est envisagée.
2. Une absence d’intérêt pour le bien concerné
Lorsqu’un bien n’a aucun intérêt stratégique (logement vacant peu attractif, maison hors zone d’aménagement prioritaire, terrain enclavé…), la collectivité peut choisir de ne pas engager de procédure et laisser le délai courir. Le silence vaut alors décision tacite de non-préemption.
3. Un défaut de transmission ou d’identification du dossier
Il arrive que la DIA ne parvienne pas aux bons interlocuteurs, soit par erreur de destinataire (commune au lieu de l’EPCI compétent), soit par perte ou mauvaise identification en mairie. Ce type d’erreur administrative peut passer inaperçu jusqu’à ce que le notaire relance.
4. Un manque de clarté dans le contenu de la DIA
Une DIA imprécise ou incomplète peut entraîner une demande de pièces complémentaires. Si cette demande n’est pas formalisée, ou si la mairie n’indique pas officiellement que le délai est suspendu, cela peut créer un flou sur le début effectif du délai légal.
5. Une mauvaise organisation interne
Dans certaines collectivités, le traitement des DIA peut être ralenti par l’absence de procédure interne claire, de personnel formé ou d’outil numérique adapté. Il n’est pas rare que les DIA soient traitées manuellement ou en version papier, sans accusé de réception systématique.
Comment réagir en cas de silence prolongé ?
1. Vérifier la bonne réception de la DIA
Le notaire doit systématiquement exiger un accusé de réception (AR) de la part de la mairie. Ce document fait foi du point de départ du délai de deux mois. En l’absence d’AR, la preuve de dépôt (LRAR, remise en main propre contre signature) est essentielle.
2. Respecter le délai légal de deux mois
Même sans retour, la loi permet de passer à la signature définitive dès l’expiration du délai à condition que la DIA ait été transmise valablement. Le silence de la mairie ne bloque donc pas la vente juridiquement.
3. Relancer par écrit
Il est recommandé de relancer la mairie une quinzaine de jours avant l’expiration du délai, en rappelant la date de réception de la DIA. Cela permet d’éviter toute contestation ultérieure.
4. Anticiper les blocages dès l’avant-contrat
L’avant-contrat peut prévoir une clause spécifique indiquant qu’en l’absence de réponse dans les délais légaux, la vente pourra être poursuivie. Cela protège juridiquement le notaire et les parties.
Conclusion
Le silence d’une mairie face à une DIA n’est pas forcément problématique sur le plan légal, mais il soulève des enjeux pratiques importants. Le notaire joue ici un rôle crucial pour garantir la traçabilité du dépôt et sécuriser la vente. Une bonne coordination avec les services urbanisme, des relances ciblées et une gestion rigoureuse du calendrier permettent de transformer un silence administratif en simple formalité, plutôt qu’en source de tension ou d’incertitude.